Home Bots in Society Mission Perseverance : une SuperCam française prête à étudier les roches martiennes

Mission Perseverance : une SuperCam française prête à étudier les roches martiennes

by Olivier Bouzereau

André Debus, Chef de projet au CNES (Centre national d’études spatiales) et ingénieur INSA Lyon en génie mécanique construction, répond aux questions de Rocking Robots sur les missions confiées à Perseverance et à sa SuperCam, conçue et fabriquée en France.

Quelles innovations l’IA apporte-t-elle à la mission Perseverance sur Mars ?

Dès l’instant où la sonde entre dans l’atmosphère martienne, plusieurs séquences automatisées et autonomes doivent se succéder. Les nouveautés interviennent dans le processus d’atterrissage surtout. En particulier, l’ouverture du parachute est déclenchée à un moment donné en fonction de la position de la sonde par rapport à son point d’atterrissage, entre 9 et 13 km d’altitude, et non plus à une vitesse donnée, pour que la sonde reste sur la bonne trajectoire. Elle conserve en mémoire sa trajectoire jusqu’au point d’atterrissage du cratère Jezero où le Rover Perseverance doit se poser. Autre nouveauté, le rover a en mémoire une carte composée d’images HD captées préalablement par des sondes orbitales et sur laquelle les zones dangereuses sont localisées. La comparaison des images captées lors de la descente du Rover avec celles en mémoire permet de le localiser, et d’éviter d’atterrir sur une zone dangereuse. Grâce à sa capacité de propulsion, la sonde peut se déplacer horizontalement sur 600 mètres pour ajuster sa trajectoire et se poser sur une zone sans danger. Une fois posé, le Rover Perseverance profite de capacités de déplacement autonomes, permises par 6 caméras Hazcams, dont 4 sont disposées à l’avant et 2 à l’arrière de l’astromobile ; elles servent à détecter des crevasses ou de gros rochers, afin de les contourner. Le CNES et Airbus ont développé des algorithmes équivalents pour la mission ExoMars.

Quelles difficultés majeures avez-vous rencontrées lors de la conception de SuperCam, l’oeil de Perseverance ?

 C’est un ensemble instrumental composé de cinq parties, dont trois spectromètres, une caméra et un microphone qui doivent tous résister aux conditions de l’environnement, depuis le lancement de la mission jusqu’à sa phase opérationnelle sur Mars. Le design doit prendre en compte de nombreuses contraintes et de nombreux tests doivent être menés à différentes étapes. Les calibrations sont également très pointues. Dans ce programme, deux SuperCam ont été réalisées ; un modèle de qualification qui a subi de multiples outrages avec des marges de 50% pour être sûr que le modèle de vol, testé avec une marge plus réduite, soit entièrement fonctionnel. La mise au point du laser LIBS (Laser Induced Breakdown Spectroscopy) développé par Thales LAS  ainsi que sa durée de vie forment deux autres points importants pour déterminer la composition chimique des roches martiennes, à partir de l’émission lumineuse du plasma. En émettant un deuxième faisceau laser, de couleur verte, cet instrument va déterminer la composition moléculaire des matériaux examinés en spectrométrie Raman.

Qu’est-ce qui distingue cette mission Perseverance des précédentes sur mars ?

Il y a eu près de 50 missions parties de la terre en direction de Mars depuis 1960 avec beaucoup d’échecs au début, mais très peu depuis 20 ans : nos collègues américains ont réussi huit atterrissages sur neuf, ce qui est considérable. Les quatre objectifs de la mission Perseverance sont la géologie, l’astrobiologie – par détection de biosignatures sur les roches -, la collecte d’échantillons, et l’expérience Moxie qui vise à fabriquer un peu d’oxygène à partir du gaz carbonique présent dans l’atmosphère. La collecte d’échantillons est permise par une foreuse placée au bout du bras de Perseverance. Ces échantillons, confinés hermétiquement dans des containers ultrapropres et stériles, seront récupérés dans la cadre du programme MSR (Mars Sample Return) et ramenés sur terre vers 2031 ou 2032.

Espère-t-on découvrir des traces de vie sur Mars ?

On aura surtout une bien meilleure connaissance de la minéralogie et de la géologie de Mars. Il y a deux points majeurs que l’on pourra élucider ensuite, sur terre, dès 2031. On va pouvoir dater les roches prélevées en géochronologie, une échelle de datation beaucoup plus précise. La recherche de traces de vie sera également mieux faite sur terre, dans des laboratoires spécialisés, sans que l’on puisse présager encore, à ce stade, de possibles retombées en physique, en biologie ou en médecine.

Quel est le délai de communication entre mars et la terre ?

Actuellement, il est de 11 minutes et 22 secondes, Mars est actuellement à 200 millions de kilomètres de la Terre. Il s’inscrit dans une fourchette comprise entre 4 et 20 minutes selon la distance entre les deux planètes. Songez qu’il a fallu à Perseverance six mois et demi pour parcourir 471 millions de kilomètres.

Quand verra-t-on sur terre les premières vidéos tournées par SuperCam ?

Les premières images traitées issues de Supercam devraient nous parvenir environ 10 jours après l’atterrissage de Perseverance, soit le 28 février ! Une première image brute non traitée sera prise le premier jour à titre de test. Des enregistrements du microphone permettront d’écouter le claquement à l’impact du laser Infrarouge sur la roche. On essayera ainsi d’identifier des propriétés de la roche, par étude du spectre sonore. Un autre micro de la NASA écoutera des bruits technologiques. Le drone Ingenuity va également être testé avec ses deux caméras retransmettant à Perseverance des images, en guise d’éclaireur. Le Rover devra d’abord se stabiliser sur une surface plane, puis poser le drone, qui effectuera ses premiers sauts, s’élèvera de quelques mètres, puis parcourra une centaine de mètres, avant de se poser, permettant ainsi à ses capteurs solaires de recharger ses batteries.

 

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